La statue et le culte de sainte Matrone à Mazères-sur-Salat (Haute-Garonne)

        L'église paroissiale de Mazères possède une statue de sainte Matrone en bois doré qui a les caractères d'un art populaire, toutefois tempérés par le classicisme du plissé adroit de la robe et de sa taille souple.

        Cette statue de 74 cm de haut représente la sainte debout, le genou droit légèrement plié. Elle est vêtue d'une robe serrée à la taille par une ceinture. Le haut du buste est caché par une guimpe.

        L'ensemble est drapé dans un manteau retenu vers I'avant par les bras. Celui de gauche est replié, la main droite est cassée. Signe des martyrs qui partagent la royauté du Christ, Sainte Matrone est coiffée d'une couronne fleurdelisée posée sur un voile. Le visage, le cou et les mains ne sont pas dorés. Il semble qu'un petit socle creusé à I'avant d'un loculus ait été ajouté pour transformer la statue en reliquaire. Ce dernier est aujourd'hui vide. Cette statue pourrait être datée du XVe siècle.

         Selon la tradition, la chapelle de Sainte-Matrone serait due à la piété d'un riche marchand du lieu de Mazères. Voyageant en mer Égée, son bateau essuya une forte tempête. L'équipage terrorisé implora alors le secours d'une sainte qu'il savait très honorée dans cette contrée lointaine. Notre marchand joignit ses prières à celles des marins en faisant le vœu, s'ils étaient sauvés, de faire bâtir à ses frais dans son pays une chapelle en l'honneur de cette sainte. Son vœu exaucé, notre voyageur, qui ne nous a pas laissé son nom, fidèle à ses promesses fit bâtir sur la terrasse, à l'emplacement d'un temple païen dédié à Cybèle, la chapelle qui vient d'être partiellement restaurée.

        Sur la charte de 1195, Matrone est orthographiée Mairone. Certains écrivent Mayronne ou plus exactement Mayrouno selon la prononciation occitane qui n'aurait jamais dû être substituée à la forme savante de Matrone. Nous savons qu'il a existé plusieurs personnes du nom de Matrone ou Matrona ayant vécu en Asie Mineure. Ce nom d'apparence latine, comme Matres, Matronae doit signifier « eaux mères », se trouve aussi à l'origine de notre mot « marne ». Les Matrona étaient des déesses protectrices des sources de nos campagnes.

         À Mazères, la légende dit que jadis près de la chapelle coulait une fontaine miraculeuse et ceux qui venaient avec foi se désaltérer dans ces eaux étaient guéris de diverses maladies. Cette source est aujourd'hui disparue et on ne connaît plus l'endroit où elle sourdait, à moins qu'il ne faille y voir la fontaine de la Hountas qui coule plus au sud de l'église. Considérées comme puissances de vie et de fécondité, les matrones représentaient la maternité humaine et la force créatrice de la nature.

         Depuis l'époque qui nous occupe et dans les siècles qui suivirent, la fête de sainte Matrone était célébrée le 12 septembre avec solennité par les autorités du village entourées de toute la population des villages voisins venus participer à la grande procession où les reliques de la sainte étaient portées par des jeunes filles vêtues de blanc, qui avaient fait de ce jour une fête qui leur était spécialement dédiée.

         Dans l'iconographie de l'art chrétien, Matrone ou Matrona fut guérie par saint Priscus sur le tombeau duquel elle fit bâtir une basilique. Il existe une chapelle dédiée à Matrone à San Prisco, près de Naples (Italie).

René Ferré

Statue de sainte Matrone
Statue de sainte Matrone
Mazères-sur-Salat


Santa Matrona
Statue de sainte Matrone
San Prisco

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